Amazon Canada ferme ses sept entrepôts au Québec
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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — Amazon Canada ferme ses sept entrepôts au Québec, une décision qui touche 1700 employés permanents.
Les fermetures s’effectueront au cours des deux prochains mois à des dates différentes pour chaque site. En plus des 1700 employés permanents, les sept entrepôts comptent également 250 employés temporaires qui verront leur contrat honoré jusqu’à l’échéance, confirme le détaillant en ligne.
Le couperet tombe dans un contexte de relation de travail tendue avec les employés syndiqués de l’entrepôt de la multinationale américaine à Laval. Amazon s’était opposée à l’accréditation syndicale de la CSN accordée en mai, mais avait été déboutée par le Tribunal administratif du travail en octobre.
Amazon affirme que la décision, «qui n’a pas été prise à la légère», n’a aucun lien avec la syndicalisation de son entrepôt. L’entreprise revient ainsi à son modèle d’affaire de 2020, qui misait sur des sous-traitants pour faire la livraison de colis.
«Suivant une révision récente de nos opérations au Québec, nous avons vu que de retourner vers un modèle de livraison par de tierces parties supportées par de petites entreprises locales, similaire à ce que nous avions en 2020, permettra d’offrir le même bon service et même des économies pour nos clients à long terme», affirme la porte-parole Kristin Gable dans une déclaration écrite.
Amazon Canada assure que les employés licenciés auront droit à «des avantages transitoires, comme des ressources externes de relocalisation en emploi» et une indemnité pouvant aller jusqu’à 14 semaines.
Réaction dénoncée et appel au boycottage
Questionnée sur le sujet, la ministre québécoise de l'Emploi, Kateri Champagne Jourdain, n’a pas voulu dire si elle croyait que le licenciement avait un lien avec la présence d’un syndicat dans l’entrepôt de Laval. «Écoutez, c'est une décision qui appartient à Amazon pour le moment. C'est une décision de réorganisation», a-t-elle répondu en mêlée de presse en marge du caucus présessionnel de la Coalition avenir Québec (CAQ) à Saint-Sauveur.
Plus tard dans la journée, le ministre du Travail, Jean Boulet, a également refusé de se prononcer sur le rôle qu'a joué la syndicalisation dans la décision.
Le premier ministre François Legault a évité les questions sur le sujet, en parlant de hockey et de jus d’orange.
«Un, le Canadien a encore gagné. Deux, je n'ai pas bu de jus d'orange ce matin», a-t-il lancé aux journalistes qui tentaient d'obtenir sa réaction.
La réaction du premier ministre a soulevé l’ire du chef de l’opposition officielle, Marc Tanguay. «Je dénonce cette réaction déconnectée et insensible de François Legault», a-t-il déclaré en marge du caucus présessionnel du Parti libéral du Québec (PLQ) à Orford, en Estrie.
«C'est un François Legault qui en a échappé toute une, qui a manqué de sensibilité, dénonce-t-il. Je lui demande de se ressaisir, de corriger le tir, d'agir comme un premier ministre qui est là pour défendre notre monde et qui est là pour se préoccuper de notre monde.»
M. Tanguay a été plus loin que la ministre de l’Emploi en évoquant la possibilité que la décision ait un lien avec la syndicalisation, même si «on n'en a pas évidemment la preuve». «Peut-être qu'il y avait un lien là, ce qui serait tout à fait condamnable et malheureux.»
La porte-parole libérale en matière d’emploi, Madwa-Nika Cadet, croit qu’il serait approprié que le gouvernement du Québec boycotte Amazon. «C'est sûr que le gouvernement doit arrêter d'acheter sur Amazon à ce stade-ci.»
Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, appuie l’idée d’un boycottage gouvernemental, mais reconnaît que l’idée de créer un tel mouvement dans la population générale n’est pas réaliste.
«Je sais que les gens qui ont pris l'habitude d'acheter des produits de consommation courante qui arrivent dans un suremballage pas très écologique sur le pas de la porte, j'en suis comme n'importe qui d'autre compte tenu de ce que sont mes horaires, n'abandonneront pas ça demain matin», a-t-il répondu en marge de son caucus à Laval.
Il reviendrait à l’État, selon lui, de trouver un moyen de soutenir la concurrence à Amazon. «Je m'attends à ce que l'État, qui justement devra faire des investissements dans une économie concurrentielle qui soit canadienne et québécoise, encourage l'émergence d'alternatives.»
Stéphane Rolland, La Presse Canadienne