Les jurés entendent les plaidoiries finales au procès du blocus frontalier de Coutts
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Par La Presse Canadienne, 2024
LETHBRIDGE, Alb. — Un procureur de la Couronne qui a plaidé contre trois hommes accusés de méfaits lors du blocus frontalier de Coutts, en Alberta, a indiqué mardi aux jurés qu'ils n'avaient pas besoin de déterminer que les prévenus étaient des champions de la protestation pour les déclarer coupables.
Les avocats de la défense soutiennent cependant que leurs clients étaient des modérés qui ont joué un rôle mineur.
Dans ses plaidoiries finales, le procureur Steven Johnston a déclaré que si les jurés étaient convaincus que les trois soutenaient manifestement le blocus, ils devraient être reconnus coupables de méfaits d'une valeur supérieure à 5000 $.
«Le droit de manifester ne permet pas d'assiéger une propriété pendant deux semaines, a-t-il lancé au jury. Un acte ou une déclaration d'encouragement peut suffire à condamner. La Couronne n'a pas à prouver que ces hommes étaient les dirigeants.»
Alex Van Herk, Marco Van Huigenbos et Gerhard (George) Janzen sont jugés devant la Cour supérieure de l'Alberta.
La Couronne a soutenu que les preuves montrent que les accusés étaient des acteurs clés et sont devenus des visages du blocus qui a entravé la circulation au poste frontalier canado-américain à Coutts pendant deux semaines au début de 2022 pour protester contre les règles et les restrictions liées à la COVID-19.
M. Johnston a affirmé que les accusés soutenaient clairement le blocus. Il a insisté auprès des jurés pour dire que les trois hommes parlaient au nom des manifestants et que les preuves «ne devraient vous laisser aucun doute sur la culpabilité de ces hommes».
«Ils utilisent les mots "Nous, le convoi Coutts". Ce ne sont pas de simples messagers. Ils utilisent les mots "Nous" et "notre".»
Les avocats de la défense n'ont présenté aucune preuve au cours du procès et les accusés n'ont pas témoigné.
Cependant, lors du contre-interrogatoire des témoins, la défense a soutenu que le trio n’était pas coupable parce que la manifestation impliquait de nombreuses personnes qui n’étaient pas toujours d’accord entre elles publiquement.
L'avocat de la défense, Ryan Durran, a dit aux jurés que son client, M. Van Huigenbos, n'était pas un leader, mais qu'il avait été transformé en messager par la GRC.
«Marco était là pour faire passer un message. Il avait un rôle de porte-parole. Il donnait à la GRC les nouvelles de la journée.»
M. Durran a ajouté que M. Van Huigenbos faisait partie d'un groupe qui n'avait pas réussi à mettre fin au blocus.
«Voilà pour le leadership. Il ne l’a pas commencé, il ne l’a pas contrôlé et il n’y a pas mis fin. Mais il a porté le message.»
Selon lui, les trois accusés ne peuvent pas être blâmés pour les actions d'une «horde de manifestants».
M. Johnston, qui représente M. Van Herk, a déclaré que le convoi faisait partie d'un «grand hiver de mécontentement politique», au cours duquel une masse de manifestants aux opinions divergentes ont convergé vers la frontière.
«Le jury devra décider si M. Van Herk était simplement à Coutts pour communiquer un message.»
Il a souligné que son client avait tenté en vain à deux reprises de convaincre les manifestants de partir et qu'il craignait d'enfreindre les lois fédérales.
«Tout le monde à la manifestation n'est pas coupable d'un crime, a martelé M. Johnston. Van Herk n'avait d'influence dans l'esprit de personne.»
L'avocat de M. Janzen, Alan Honner, a soutenu qu'il y avait peu de preuves que son client ait initié la manifestation. Il a précisé que M. Janzen était toujours prêt à aider les autres manifestants à résoudre leurs problèmes et à travailler avec la GRC.
«C'est le vrai George Janzen. Il aide parce que c'est ce qu'il est», a assuré M. Honner.
«Faites preuve de bon sens»
Avant que les jurés ne commencent leurs délibérations, le juge Keith Yamauchi a rappelé qu'une condamnation pour méfait ne peut être obtenue que s'il y a eu entrave à la propriété, si l'action était illégale, si la conduite était délibérée et s'il y avait une intention de commettre un crime.
«Faites preuve de bon sens», a-t-il ordonné au jury.
Au cours du procès, la Couronne a appelé une poignée de témoins, dont des membres de la GRC qui étaient sur les lieux et l'ancien maire de Coutts, Jim Willett.
Les agents ont témoigné qu'à mesure que la manifestation se prolongeait, la direction de celle-ci s'est concentrée autour des trois accusés et la GRC s'est de plus en plus tournée vers eux pour négocier.
Le sergent Greg Tulloch a indiqué au tribunal la semaine dernière qu'il s'efforçait d'établir un dialogue avec les manifestants et qu'il avait identifié M. Van Huigenbos comme le principal contact.
M. Tulloch a déclaré qu'il considérait M. Van Huigenbos comme étant au centre du cercle restreint de la protestation, suivi de M. Janzen et, dans une moindre mesure, de M. Van Herk.
La défense a montré une vidéo du lieu de rassemblement des manifestants, Smuggler's Saloon, où l'on entend M. Van Herk demander un vote pour essayer de faire partir tout le monde, mais il se heurte à une opposition. «Je m'en fiche, laissez-les venir», dit un homme sur la vidéo. «La seule façon pour moi de partir, c'est dans une voiture de police», lance un autre.
On a demandé au maire Willett en contre-interrogatoire s'il y avait un groupe en charge de la manifestation.
«C'était un groupe de gens que je ne connaissais pas, qui conduisaient des véhicules et qui étaient en colère», a-t-il répondu.
Bill Graveland, La Presse Canadienne