Quand humour noir rime avec compassion
Par Claudia Berthiaume
La tournée québécoise de la pièce Vigile s’est terminée à Trois-Rivières mardi. Éric Bernier et Andrée Lachapelle ont élégamment rendu l’histoire saisissante de cette pièce.
Vigile raconte une tranche de la vie de Kemp, un employé de banque morose, qui se rend au chevet de Grace, sa tante mourante. En attendant le décès de cette dernière, Kemp passe son temps à monologuer sur tout ce qui se passe à l’intérieur et à l’extérieur de la pièce où il est confiné.
Synopsis monotone, direz-vous? Au contraire. Cette pièce jette les bases d’une réflexion sur la mort, la solitude; plus encore sur la compassion. L’intrigue en crescendo laisse voir un Kemp à la personnalité trouble, voire bipolaire, qui vocifère ses états d’âme.
Vigile, c’est aussi la rencontre de deux solitudes. Tout en anticipant le décès de sa tante, qu’il n’avait pas vue depuis 30 ans, le neveu exprime sa propre solitude et son manque d’aptitudes sociales.
L’humour noir, rendu cocasse par Éric Bernier, choque le spectateur, mais le force à réfléchir. C’est une pièce qu’il faut prendre le temps de digérer.
Andrée Lachapelle, dont le texte ne se résume qu’à quelques répliques vers la fin, réussit à être crédible dans le silence grâce à ses mimiques exagérées. Elle arrive même à faire rire la foule à plusieurs reprises.
La mise en scène saccadée de Martin Faucher, ponctuée par des notes de violoncelle et de piano, fait prendre conscience du rythme effréné du temps qui passe, mais aussi de l’éternité que prend Grace pour mourir. Aux moments où la pièce connaît des longueurs, et où le spectateur se dit: “ça y est, elle va mourir” ou encore “il va la laisser seule”, un punch le ramène dans l’intrigue. Le dénouement est d’ailleurs tout aussi saisissant.
Bref, Vigile est une pièce surprenante, crédible et percutante. S’il fallait la résumer en une phrase, je dirais: « si tu n’meurs pas bientôt, ça va m’tuer ».
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