Triptyque, poignant et profond
Par Philippe Doucet
Robert Lepage, le réalisateur, revient au cinéma pour une première fois depuis 2003 La face cachée de la Lune et il ne manque pas son retour. S’associant à Pedro Pires, qui a réalisé l’excellent court-métrage Danse macabre, Lepage coréalise un chef-d’œuvre du cinéma francophone.
Tirée de la pièce de théâtre Lipsynch, véritable fresque théâtrale de huit heures trente minutes, cette version cinématographique reprend trois des personnages de la pièce, Michelle, sa sœur Marie, et Thomas, le chirurgien. Tous joués à merveille par les acteurs Lise Castonguay, Frédérike Bédard et Hans Piesbergen.
Présenté en trois actes, le film s’ouvre sur la réalité de Michelle, schizophrène, qui tente de reprendre le contrôle de sa vie. Dans une Québec froide et majestueuse, Michelle est aux prises avec des murmures qui la hantent. Cette libraire passionnée s’attache à sa passion, les mots, qu’elle partage avec émotions.
Puis Marie, sa sœur, chanteuse de jazz, qui perdra temporairement l’usage de sa voix suite à une opération au cerveau visant à lui retirer une tumeur. Pedro Pires signe d’ailleurs ce qui deviendra un moment marquant du cinéma québécois. L’opération de Marie est tout simplement sublime, d’un visuel à couper le souffle, d’une émotion palpable. De réelles images d’opérations ont d’ailleurs été tournées par Pires, pour rendre compte de la gravité, et aussi de la beauté de la situation.
Enfin Thomas, neurochirurgien, aux prises avec des tremblements à la main droite, est à la recherche d’une solution face au chaos de ses pensées. Il s’éprendra de Marie, sa patiente et mettra un peu d’ordre dans sa vie. C’est dans cet acte que tous retrouveront partiellement leur chemin.
De mains de maîtres
La réalisation artistique est réussie à tous les niveaux. Chaque plan est un tableau, les images de coupes sont pertinentes et évocatrices. On y voit une Québec froide, mais somptueuse, une Londres disciplinée avec un brin de folie et une Montréal échevelée, à bout de souffle. Pedro Pires se sert d’images éloquentes pour mettre en lumière le scénario de Lepage et le film se transforme sous nos yeux en véritable poème dédié à l’art, à la science et à l’individu. Triptyque est à voir, et à revoir.
En salle au cinéma Le Tapis rouge de Trois-Rivières du 25 au 31 octobre.
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